Ce n'est pas parce que je suis rentré en France que j'en ai oublié mon pays d'adoption temporaire !
En ce moment, comme le laisse parfois apparaître la presse
Française, se passe les élections Australiennes !
Le système politique Australien
Les Australiens ont été appelés aux urnes le 7 Septembre, pour choisir leur nouveau Premier Ministre. C'est l'occasion pour moi de parler un peu du système politique Australien et des enjeux majeurs du scrutin.
Rappelons au passage que la Reine d'Angleterre Elizabeth II d'Angleterre
est toujours le chef de l’État
Australien (tout comme le Canada), bien que cela fasse des controverses
régulières.
Afin de mettre fin à la polémique entre les
"Républicains" (cad les partisans de la transformation de l'Australie en République) et ceux attachés au lien historique avec la Grande
Bretagne, les autorités Australiennes et les médias célèbrent désormais
"la Reine" tout court, sans préciser s'il s'agit d'Elizabeth II ou de
la Reine Victoria (considérée comme la fondatrice de l'Australie).
Rappelons aussi que la capitale fédérale, administrative et
Politique de l'Australie est Canberra.
J'avais déjà parlé du bâtiment principal servant de
parlement dans ces messages :
http://aventures-en-australie.blogspot.fr/2013/01/canberra-partie-1-la-capitale.html
http://aventures-en-australie.blogspot.fr/2013/01/canberra-partie-2-visites.html
Le système politique Australien est à cheval entre le
système Britannique, à qui il emprunte une grande partie de ses caractéristiques,
et le système Américain, vaste Etat fédéral oblige. Il se compose
principalement de 2 "Chambres".
- la "Chambre basse" : la Chambre des
Représentants, l'équivalent de notre Assemblée Nationale, composée de 150
membres. Chaque député représente une circonscription de 85 000 habitants, et
sont élus par un système assez complexe de vote préférentiel. Le nombre de député est donc variable en fonction des évolutions de la population.
Le Gouvernement (Ministres) siègent à cette assemblée, sur les bancs situés juste à côté de la table
Le Gouvernement (Ministres) siègent à cette assemblée, sur les bancs situés juste à côté de la table
- La "Chambre Haute" (Sénat), inspirée par le système fédéral
Américain, est composée de 76 sénateurs, qui représentent les différents Etats
et Territoires de l'Australie. Il y a un nombre fixe et égal de Sénateurs par État (à l'exception de Canberra et des Territoires du Nord, au grand dam de la population Aborigène). Ils sont élus à la proportionnelle.
Les différents Partis
Le système est pluri-partis, mais seuls les 2 principaux
partis s'opposent en réalité :
- Liberal Party of Australia (Libéraux) : L'équivalent de
l'UMP (attention : le mot "liberal" n'a pas le même sens en Anglais
US et en Anglais Australien...)
- Les Ecolos jouent souvent le rôle d'arbitre, bien qu'ils soient généralement associés aux Travaillistes :
On compte aussi 2-3 autres partis
plutôt folkloriques (Notamment le
"Sex Party of Australia", militant pour les droits LGBT et ...
la légalisation de la pornographie)
La politique Australienne : tout dans la Classe !
Les élections fédérales pour la chambre basse ont lieu tout les 3 ans, ce qui est
assez court.
A noter que le taux de participation est particulièrement élevé en Australie : supérieur à 90%, car le vote est obligatoire pour les citoyens Australiens, et ne pas voter ou oublier de voter constitue une infraction passible de 100 $AU d'amende (et allleeer..)
Contrairement à la France, les Australiens n'élisent pas une
personne mais un Gouvernement (majorité parlementaire), représenté par une
personne, le Premier Ministre.
Avant 2007, l'Australie était dirigée par John Howard, (Ultra) Libéral
et dur à cuire de la Droite.
Sa politique musclée envers les Aborigènes, son mépris de l'écologie (refus catégorique de signer le Protocole de Kyoto) et surtout son engagement trop prononcé envers les Américains lors de la Guerre d'Irak en 2003 ont fini par lui coûter sa place.
Sa politique musclée envers les Aborigènes, son mépris de l'écologie (refus catégorique de signer le Protocole de Kyoto) et surtout son engagement trop prononcé envers les Américains lors de la Guerre d'Irak en 2003 ont fini par lui coûter sa place.
L'arrivée de Kevin Rudd et des travaillistes en 2007 a
clairement réorienté la politique Australienne vers plus de justice sociale, de
redistribution fiscale et d'investissements dans les infrastructures, avec
cependant une augmentation significative des impôts et autres taxes.
Le gouvernement Travailliste a été réélu en 2010, après le
retrait de Kevin Rudd au profit de Julia Gillard, suite à de sévère batailles
partisanes au sein même du Parti (cela est très important pour comprendre la suite)
Les enjeux de la société Australienne.
Bien que n'étant resté que 10 mois sur place, il est facile
de se faire une idée des principaux enjeux politiques Australiens. En effet,
l'Australie n'ayant "que" 24 Millions d'habitants, et la structure de
l'économie Australienne étant assez simple à comprendre (par rapport aux pays
Européens), les principaux sujets de polémiques sont toujours les mêmes :
- Attitude et politique vis-à-vis de la communauté Aborigène
- Taxes , en particulier pour les activités minières
- Choix à faire entre développement économique (aka Minier)
ou écologique (taxe Carbone, etc...)
- Gestion de l'immigration légale et illégale.
- Rôle de l'Etat Fédéral par rapport aux 8 Etats et
territoires
- Renouvellement / création d'infrastructures (routes,
trains, etc...)
Sans surprise, les Travaillistes (Gauche,associés aux Verts)
militent pour un système social plus solide (la Santé et l'Education sont
quasiment 100% privatisées, et chères !), une meilleure reconnaissance des
Aborigènes avec une politique de discrimination positive envers eux, un
assouplissement des règles d'immigration en particulier pour les réfugiés, le
respect du protocole de Kyoto et le durcissement des règles d'obtention des
permis miniers.
Les Libéraux (Droite) défendent un baisse généralisée des taxes et
impôts sur les entreprises, une égalité devant les aides sociales (moins d'aides ciblées pour les Aborigènes), l'abandon
pur et simple de la taxe Carbone, l'assouplissement des règles pour l'obtention
des permis miniers, et une autonomie plus grande des Etats et des régions en
matière financière.
A noter que les 2 partis s'entendent en politique étrangère
pour ne plus suivre aveuglément les Américains, surtout pour les interventions
militaires.
3 éléments qui ont surtout occupés la politique Australienne ces 2 dernières années :
- la "Mining Tax" : une taxe spéciale sur les
super-profits des entreprises minières (Rio Tinto et BHP Billiton en
particulier), car le secteur Minier a particulièrement bien profité de
l'envolée des prix des matières premières à partir de 2008. Elle est évidemment
très impopulaire dans les milieux d'affaire et chez les ouvriers du secteur, d'autant que les salaires y sont très élevés
L'image résume assez bien 80 % de l'activité économique porteuse de l'Australie, et la principale raison de la prospérité du pays : Faut que ça creuse !
- La gestion des réfugiés, des immigrants illégaux et des
boat-people : L'Australie étant un pays riche, de nombreux immigrants
Est-Africains, Pakistanais, Bangladais, Cambodgiens ou Indonésiens essaient de
débarquer sur le continent à l'aide de bateaux de fortune depuis l'Indonésie. Comme les boat people Africains qui débarquent en Espagne, en France ou en Italie, les Autorités Australiennes ne savent pas vraiment quoi faire de cette population.
A la manière de Sangatte dans le Nord de la France, Malte ou Lampedusa en Italie, les candidats à l'immigration étaient "parqués" dans des centres de rétention dans le Nord de l'Australie.
Une solution plus ou moins temporaire a finalement été trouvée : Les immigrés clandestins seront systématiquement renvoyés vers... la Papouasie Nouvelle Guinée, moyennant un gros chèque annuel de plusieurs centaines de millions de la part de l’État Australien. L'idée étant de décourager l'immigration illégale en faisant en sorte que les clandestins ne gagnent rien à faire le voyage (la Papouasie n'étant pas réputée pour son niveau de vie...)
Cette question est d'autant plus sensible que les Australiens sont quasiment tous issus de l'immigration, et que le pays conçoit l'immigration (légale) comme un des moteurs principaux de son développement.
De plus, la question de l'immigration est systématiquement associée à la notion d'offre et de demande sur le marché du travail (rappelons que cette question est quasiment taboue en France et en Europe). Cela interpelle de nombreux Australiens pour qui la limitation du flux migratoire paraît essentielle pour maintenir un niveau de vie et des salaires élevés. A l'inverse, le patronat Australien, de son côté, ouvrirait volontiers les portes de manière à faire diminuer les salaires.
- Les relations économiques par rapport à l'Asie : tout
comme en Europe, l'économie Australienne hors secteur Minier souffre énormément
de la concurrence frontale avec la Chine, mais aussi avec la Thailande, la
Malaisie ou l'Indonésie. Le peu d'industries dont l'Australie dispose cède le
pas.
A titre d'exemple, lorsque je suis parti, Ford Motors Company annonçait la fermeture définitive de ses activités en Australie en 2016.
D'un autre côté, les Australiens eux-mêmes partent en vacances dans le Sud-est Asiatique tellement les prix du tourisme sont élevés.
Par rapport aux USA qui s'entre-déchirent sur les questions religieuses (créationnisme) ou de violence (libre circulation des armes) , la politique Australienne reste quand même (et heureusement !) assez centrée sur des sujets "utiles" et concrets, et plus proche dans son déroulement d'élections législatives en Europe.
Par rapport à l'Europe, la politique Australienne, à la manière de la Nouvelle Zélande voisine, semble attendre que les "gros débats de société potentiellement casse-gueule pour un politicien (mariage Gay, immigration, aides sociales, etc...) se passent en Europe, puis "récupèrent" les "bonnes" décisions. Cela est d'autant plus facilité que les médias Australiens sont constamment branchés sur l'Europe, le Royaume Uni en particulier.
L'élection de 2013
Les élection de Septembre 2013 était assez singulière, dans
le sens où les Australiens débattaient plus de l'impopularité de la Première
Ministre sortante, Julia Gillard, et de la guéguerre au sein du Parti
Travailliste que d'un véritable affrontement Gauche-Droite de fond.
En effet, contrairement aux pays d'Europe et aux USA, l'économie Australienne se porte très bien (merci les mines !)(+3% de croissance en continu sur les 7 dernières années), et le bilan des précédentes années Travaillistes a été salué jusque par la Droite.
Il faut comprendre que Julia Gillard est un peu la "Ségolène
Royal" Australienne : c'est soit on l'aime, soit on ne peut pas la
supporter. En particulier, c'est son côté donneuse de leçon qui énervait plus
d'un Australien. De plus, elle portait pas mal de "casseroles", qui datait d'avant son élection, et portaient sur des luttes d'influences, etc...
En face, le principal opposant du Parti Libéral, Tony
Abbott, a la particularité d'être lui même particulièrement impopulaire, et ce
même chez les partisans de la Droite Australienne.
Il faut avouer le personnage est peu engageant : ancien
séminariste, particulièrement religieux et peu cultivé, il est connu pour son
franc-parler, sa capacité à "taper sous la ceinture", sa misogynie (il proposait à Julia Gillard de retourner à sa cuisine...) et son côté beauf (surf + barbecue les week end...).
Dans le même genre, il est aussi ouvertement climato-sceptique
et souhaite supprimer la taxe Carbone
Les travaillistes étaient tellement sûr de leur supériorité
(ils avaient pour eux un excellent bilan économique et social sur les 6
dernières années), ils se sont entre-déchirés pendant presque un an pour savoir
qui serait le chef.
Julia Gillard n'était pas étrangère à ce jeu, si bien
qu'elle est devenue particulièrement impopulaire début 2013, à tel point
qu'elle joua son va-tout en Juin pour obtenir l'approbation de son Parti pour
les élections.
Elle reçut une désapprobation générale, et le Parti Travailliste dû faire appel en urgence à l'ancien Premier Ministre à la retraite, Kevin Rudd, pour diriger le pays jusqu'aux élections et se représenter :
Bien qu'étant largement plus populaire que Julia Gillard, l'ancien Premier Ministre n'a pas réussi à redresser la barre jusqu'aux élections. C'est à lui que la décision de renvoyer les boat-people vers la Papouasie revient.
Les Libéraux en ont logiquement profité pour pousser leurs
pions et prendre avantage de ce foutoir qui a vraiment fatigué les citoyens Australiens.
Le 7 Septembre 2013, les Australiens ont donc voté et choisi une large majorité (53 % ) de députés Libéraux ou assimilés, qui portèrent naturellement leur représentant, Tony Abbott comme le nouveau Premier Ministre Australien
Le 7 Septembre 2013, les Australiens ont donc voté et choisi une large majorité (53 % ) de députés Libéraux ou assimilés, qui portèrent naturellement leur représentant, Tony Abbott comme le nouveau Premier Ministre Australien
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